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[Mars 2022, WallMapu] La venue de la nouvelle ministre de l’Intérieur à Temucuicui empêchée par des groupes de weichafe

March 19th, 2022

Via La Zarzamora

Dans la matinée du mardi 15 mars, le gouvernement, par l’intermédiaire de la ministre de l’Intérieur Izkia Siches [NdT: investie le 11 mars dernier avec l’entrée en fonction du nouveau président Boric], a tenté sans succès de pénétrer sur le territoire ancestral appartenant à la communauté autonome de Temucuicui, afin de tenir une réunion avec Marcelo Catrillanca, père de Camilo Catrillanca, jeune Mapuche tué en novembre 2018 par des tueurs à gages du commando de la jungle, mais cela a été empêché par des groupes de weichafe [NdT: combattant-es Mapuche] qui ont bloqué l’accès et empêché le gouvernement d’entrer dans la communauté.

Une voiture incendiée a bloqué l’entrée du gouvernement dans la communauté autonome de Temucuicui, ainsi qu’une banderole sur laquelle on pouvait lire :

“Izkia Siches : Tant qu’il y aura des prisonniers politiques Mapuches, il n’y aura pas de dialogue. Pour Camilo Catrillanca et pour tous ceux qui sont tombés au combat. À WallMapu, nous n’accepterons aucun pot-de-vin de la part d’un État Assassin. DEHORS LES FORESTERIES ET LES LATIFUNDIA, STOP A LA MILITARISATION. RÉSISTANCE MAPUCHE”.

"Izkia Siches : Tant qu'il y aura des prisonniers politiques mapuches, il n'y aura pas de dialogue. Pour Camilo Catrillanca et pour tous ceux qui sont tombés au combat. À WallMapu, nous n'accepterons aucun pot-de-vin de la part d'un État meurtrier. PLUS DE FORESTERIE ET DE LATIFUNDIA, PLUS DE MILITARISATION. RÉSISTANCE MAPUCHE".

Bannière accrochée à l’entrée de la Communauté autonome de Temucuicui

Les raisons du rejet du “dialogue” avec le gouvernement sont évidentes : les conditions actuelles, résultat d’un processus colonialiste long et continu, ne permettent aucune forme de dialogue avec l’exécuteur de cette violence structurelle raciste.

Nous nous demandons si l’État chilien, lorsqu’il effectue des visites diplomatiques dans d’autres pays, atterrit dans ceux-ci sans en avertir les autorités, si un fonctionnaire du gouvernement mettrait le pied sur un territoire étranger sans demander l’autorisation de ceux qui organisent et dirigent ces territoires. Cela semble presque impossible, mais la vision colonialiste de l’État chilien l’a une fois de plus empêché, ainsi que ses représentants, de faire le minimum : respecter et suivre les protocoles sociaux et politiques du peuple Mapuche.

Dans une interview accordée au média Interferencia, le lonco [NdT: chef-fe d’une communauté Mapuche] de Temucuicui Autónoma, Víctor Queipul, a déclaré :

“Nous avons notre propre surveillance, s’ils veulent entrer comme ça, ils ont tout faux. C’est moi qui représente la communauté… les conseillers ont tort, car ils ne savent pas à qui s’adresser, ils parlent entre eux”.

L’autorité Mapuche a également déclaré au même média qu’aucun fonctionnaire du gouvernement ne l’avait contacté, ignorant et faisant fi du protocole Mapuche. Ce protocole est fondamental pour établir tout type de contact dans un territoire durement touché par la violence raciste de l’État, un territoire qui compte 16 prisonniers politiques, dans lequel ont eu lieu des raids violents qui ont laissé des personnes blessées et torturées, l’un des plus violents ayant eu lieu le 7 janvier 2021, et qui a même laissé des traces d’arrestations et de tortures d’enfants de la communauté.

La responsabilité de l’État dans le processus d’usurpation territoriale exécuté depuis la “pacification de l’Araucanie”, point de départ des politiques colonialistes entreprises par le $hili, semble être loin d’être reconnue par le nouveau gouvernement “progressiste”, qui soulève des concepts académiques de plurinationalité sans sortir de sa zone de confort, ignorant la continuité de la violence raciste institutionnelle exercée par l’État et ses pouvoirs, car pour en arriver là, le $hili et ses différents gouvernements ont utilisé les pouvoirs exécutif, législatif et même judiciaire pour maintenir l’assujettissement du peuple Mapuche et tenter d’interrompre tout processus qui mènerait à l’autodétermination.

La communauté autonome de Temucuicui, avec ce boycott, a mis en évidence le fond colonialiste des intentions gouvernementales, représentants d’un État qui justifie et exécute la violence raciste, un État qui n’assume pas la responsabilité de l’usurpation des terres Mapuches qu’il a ensuite cédées à des colons étrangers, un État qui se soustrait à sa responsabilité dans l’invasion de la forêt en territoire Mapuche, un État qui ignore ses propres traités, un État qui ne parvient pas à sortir de ses logiques occidentales de pouvoir car il est construit sur ces logiques.

Dans un territoire encore militarisé, Temucuicui agit en cohérence avec son expérience de résistance et sa lutte contre un état génocidaire.

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